Calder et la musique

(CD Centre Georges Pompidou)

L’art des sons

En 1913 sur fond de scandale provoqué par Schoenberg et Stravinsky, les bruiteurs italiens, en un manifeste libertaire rompent le « cercle restreint des sons purs » amenant Satie à introduire plus tard, dynamo, machine à écrire et sirènes dans Parade Ainsi tombent les frontières, car pour leurs héritiers la négation de la tonalité et la condamnation de l’orchestre traditionnel se transforme, après guerre et pour un demi-siècle, en une démarche carrément subversive. Dirigée vers l’utopie d’une musique sans mélodie, au-delà de l’harmonie et de la couleur instrumentale, elle introduit bruits et sonorités insolites, en nourrissant le désir de ne plus se vouer à l’écriture mais au son lui-même. Ainsi, en s’appuyant sur les conquêtes de la physique et les théories mathématiques devient-il matériau, à stocker, à distordre, à transformer, à étirer, à filtrer et à doter d’une quatrième dimension, la spatialité. De ce contact direct naissent grâce aux sortilèges de la machine, assistante ou sujet, des œuvres qui dans la société fatiguée de l’après guerre invitent à l’évasion ou au désir. C’est une musique nouvelle à percevoir, hors de toute culture, pour susciter le rêve et non le mettre en œuvre. Elle est d’inspiration généreuse, parfois exubérante et témoigne d’une aventure de l’art, joyeuse et poétique. Le bruit, indicatif du monde épouse le dynamisme naturel des sons musicaux tout en empruntant à la danse les rythmes essentiels de la vie. Les convictions d’E. Varèse sont convaincantes, l’humour et le goût de l’indétermination de J. Cage contagieux, le langage inventif de Pierre Henry engageant.  En ce temps là, le concert se préparait comme une cérémonie symbolique, où la raison n’avait pas sa place.